La douleur est définie comme une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle, potentielle ou décrite en ces termes.
- La douleur fait intervenir les sens, les émotions et une éventuelle lésion corporelle
- Retenons ici : Douleur ne veut pas dire lésion anatomique
Prenons l'exemple d'une entorse de cheville.
Il est possible :
- d'avoir mal même si les ligaments sont intègres (pas de lésion anatomique)
- d'avoir les ligaments rompus totalement mais de ne plus avoir mal
- d'avoir de grosses douleurs pour de lésions minimes.
En tant que patient ou thérapeute, nous donnons souvent beaucoup d'importance à l'anatomie, à la biomécanique. La lésion des tissus fait partie du problème mais n'explique pas tout. Les émotions, les sensations, les croyances ou connaissances ainsi que le contexte social influent sur l'apparition et le maintien d'une douleur.
Dès 1977, Engel développe un modèle bio-psycho-social de la douleur. [1].
Les avancées en neurosciences permettent progressivement de mieux comprendre les phénomènes douleureux. On sait désormais que l'état émotionnel peut modifier les circuits cérébraux impliqués dans le traitement de la douleur [2].
Greg Lehman, chercheur et physiotherapist (kiné) canadien reprend les dernières connaissances sur le sujet, les applique à la rééducation. Il propose une stratégie de rétablissement
Ce qu'on peut retenir :
LA DOULEUR EST MULTIFACTORIELLE !
Il existe :
- des facteurs biologiques : c'est à dire les lésions physiques « objectives » des tissus (entorse, claquage musculaire, hernie discale...) mais aussi les altérations bio-chimiques.
- des facteurs psychologiques (anxiété, catastrophisme, dépression...)
- des facteurs sociaux (satisfaction au travail, soutien de l'entourage, milieu socio-culturel...)
On peut y ajouter certaines habitudes de vie (alimentation, sommeil, activité physique...)
=> l'ensemble des ces facteurs influe sur la sensibilité du système nerveux et donc la douleur.
Une image pour illustrer les phénomènes douloureux: « La coupe est pleine »
Pour expliquer l'apparition d'une douleur, Greg Lehmann utilise l'image d'une coupe remplie de contraintes auxquelles un individu peut être soumis.
Lorsque celles-ci sont trop importantes, la « coupe est pleine de facteurs BIO-PSYCHO-SOCIAUX ».
Chaque nouvelle situation (nouvelle activité physique, nouveau travail, changement des habitudes de vie...) induit un stress (physique ou émotionnel) à l'organisme.
Ce stress n'est pas néfaste à l'organisme. Au contraire, celui-ci réagit, s'adapte et se renforce.
Nous sommes capables de subir de nombreuses contraintes physiques, mécaniques, émotionnelles et sociales sans pour autant ressentir de douleur.
Cependant, au delà d'un certain seuil, le corps n'arrive plus à s'adapter : la douleur survient.
=> La douleur/la blessure arrive quand nous en faisons trop à la fois.
Il n'y a pas de bon ou de mauvais mouvement
L'idée répandue selon laquelle, il y aurait des mouvements à proscrire est dépassée.
La plupart du temps, un lumbago se produit en effectuant un geste anodin, effectué des centaines de fois au préalable sans que rien ne se passe.
Rappelez-vous qu'il n'y a pas de « faux mouvement » juste une accumulation de petites choses qui font déborder la coupe !
Une vision positive de la douleur :
L'avantage de cette vision est que nous pouvons influer nous-même sur différents facteurs afin de réduire les douleurs.
Des choses simples comme améliorer son alimentation, reprendre une activité physique et même se coucher un peu plus tôt vont limiter les épisodes douleureux.
Le kiné ou ostéo pourra intervenir sur les lésions tissulaires objectives récentes ou plus anciennes.
Mais pour certains cas de douleurs chroniques, le rôle du kiné/ostéo est aussi d'accompagner le patient dans sa remise en activité plutôt que de « réparer » ou « remettre en place ».
Pour le sportif : la blessure n'est pas qu'un facteur chance (ou plutôt malchance)
Comme la douleur, les blessures sont multifactorielles : sommeil, alimentation mais aussi bien-être mental et vie personnelle influent sur notre réaction aux contraintes de l'effort.
Le rôle de la préparation physique est d'augmenter progressivement les contraintes afin de forcer l'athlète à s'adapter et donc progresser.
Il ne faut cependant pas dépasser une certaine dose (le sur-entraînement), sous peine de se blesser. A chacun de trouver son équilibre !
[1]Engel GL. The need for a new medical model: a challenge for biomedicine. Science. 1977 Apr 8; 196(4286):129-36.
[2] Hashmi JA et al. Shape shifting pain: chronification of back pain shifts brain representation from nociceptive to emotional circuits. Brain. 2013 Sep; 136(Pt 9):2751-68.
Pour en savoir plus: